Quelle politique énergétique pour la Tarentaise ?

La Tarentaise est une vallée qui produit et qui consomme énormément d’énergie.
Elle en produit beaucoup grâce aux installations hydroélectriques qui datent de la moitié du 20ème siècle. Les puissances des usines de Malgovert et de la Bathie sont du même ordre de grandeur que celles d’un réacteur nucléaire. A ces deux aménagements s’ajoutent de nombreuses autres centrales dont celle de la Coche qui est en fin de modernisation.

La Tarentaise consomme également beaucoup d’énergie et particulièrement en période touristique : principalement pour le chauffage de logements en altitude et en hiver et aussi via le transport de touristes sur de très longues distances.
Un bilan énergétique complet a été effectué dans cette vallée très particulière. Il met en avant l’impact du transport aérien qui est de loin le plus gros émetteur en gaz à effet de serre. Le transport routier arrive en seconde position. Le chauffage des logements touristiques occupe également une position importante. Cela ne dispense pas l’habitant moyen de Tarentaise se s’interroger sur l’isolation de son logement, sur ses moyens de transport etc..
Il serait trop long ici de rentrer dans les détails de ce bilan, mais les chiffres dérangent et interrogent nos choix de développement touristique quand on les confronte avec les objectifs nationaux de réductions de nos émissions de GES..
Depuis quelques années plusieurs projets de microcentrales ont vu le jour en Tarentaise. D’autres sont autorisés et seront peut être contestés par des associations. Plusieurs aménagements sont à l’étude...


Ces dossiers préparés de l’extérieur soit par des sociétés privées soit pas des régies électriques sont proposées « clefs en main" aux communes. Ces dernières y voient une opportunité financière et une occasion de produire une quantité d’énergie qui n’est pas complètement négligeable.


Pourquoi les projets de microcentrale sont ils parfois contestables ?
Les chiffres montrent que la Tarentaise produit beaucoup d’énergie d’origine hydroélectrique. De nombreux cours d’eau ont été affectés par ces équipements. Beaucoup de personnes ignorent les aménagements réalisés dans les années 50 qui permettent au Ponthurin de couler dans le lac du Chevril, aux affluents de la rive droite de l’Isère d’être turbinés à la Bathie après un transfert dans le Beaufortin, à l’Isère de couler sous la Lauzière pour être turbinée en Maurienne, aux Dorons des trois vallées d’être turbinés à Aigueblanche...
L’eau était un élément majeur du patrimoine paysager de Tarentaise avec des crues, des zones de divagation, des étiages. Mais cet aspect est de plus en plus gommé à la suite des aménagements qui se succèdent. Nous en sommes désormais à un stade où le faible nombre de cours d’eau ayant un débit naturel devient préoccupant. Bien sûr il y a les fameux « débits réservés », mais ils ne représentent que 10% du débit moyen ce qui est relativement peu (Ce débit permet théoriquement de maintenir la vie biologique)... Quand on examine les dossiers soumis à enquête publique, on retrouve souvent des estimations de débits plutôt que des mesures réelles, des études d’impact incomplètes, ou réalisées à la mauvaise saison. Quid des insectes, des reptiles, des amphibiens, de l’avifaune...
Le cadre communal dans lequel se déroulent ces projets n’est pas toujours satisfaisant. La commune y voit une opportunité économique à saisir avec à la clef une source d’énergie renouvelable. Mais pour les associations la vision territoriale fait défaut. Les derniers cours d’eau sauvages de la vallée sont en voie d’artificialisation sans qu’une étude globale sur l’impact effectif et complet de ces derniers équipements sur l’écosystème naturel et sur nos paysages ne soit réalisée. La loi Notre va entrainer différentes modifications : gestion de l’eau par les intercommunalités, compétence économique transférée également aux intercommunalités, regroupement éventuel de communes. Mais tout cela risque d’arriver trop tard...

Pourtant la Tarentaise a été capable de mener un Contrat de Bassin Versant qui a fait progresser la volonté des élus de travailler ensemble. Une suite est envisagée sous la forme d’un Contrat Vert et Bleu...Parallèlement nos élus ont également accepté de rédiger un Plan Climat Energie, d’élaborer un SCOT, de travailler sur l’avenir du tourisme estival, de candidater pour devenir une vallée à énergie positive...Les cadres de débat ne manquent donc pas pour aborder la question des microcentrales à condition qu’elle soit resituée dans le bon contexte. La société civile de la vallée a participé largement à tous ces débats et il est probable qu’elle est prête à poursuivre le travail sur ces chantiers entamés.

Des compromis sont-ils possibles ? Des alternatives existent-elles ?
Sans doute ! Mais le cadre de la discussion devrait être celui de la Tarentaise qui doit mener de front une politique d’économie d’énergie, une politique en matière de transport en commun et développer si possible les productions renouvelables.
Pour alimenter la réflexion du lecteur nous conseillerons la visite du site internet de la régie électrique de Grenoble (GEG) qui mène les projets de microcentrale de Peisey. On y apprend que cette régie produit également de l’électricité par centrales photovoltaïques. Pour 12.4 GWH... Elle gère également une unité de valorisation du biogaz libéré par la méthanisation des boues de station d’épuration pour une énergie produite de 17GWH.

Chacun sait que notre vallée a un potentiel important dans le domaine du solaire.
Avec un carré de 220 m de côté pourvu de panneaux photovoltaïques et orientés en gros au sud, il serait possible de produire au moins 6.6 GWH soit l’équivalent de ce que produirait une microcentrale « moyenne ». Combien de communes de Tarentaise seraient capables de trouver de tels carrés en pente et bien exposés ? Ces terrains sont souvent en déprise agricole et l’impact paysager serait limité. Bien sûr il faudrait investir massivement et les contraintes budgétaires qui pèsent sur les communes sont réelles...Mais il existe différentes structures coopératives qui pourraient peut être investir localement à condition qu’on les sollicite. Le PNR des Bauges, Chambéry Métropole, d’autres collectivités se sont lancées dans l’énergie solaire. Et nous ?
On attend toujours qu’une étude de potentiel vienne faire le bilan des matières méthanisables en Tarentaise.
Pour revenir aux microcentrales, il y a quelques années un groupe pluriel (élus et associatifs) était allé en visite en Suisse à Verbier. Cette station de ski de taille voisine de celles que l’on connait en Tarentaise turbine ses eaux usées et alimente ainsi plusieurs centaines de foyers en électricité. La commune de Tignes envisage d’investir dans un équipement de ce type et on ne peut que l’en féliciter. Pourquoi pas d’autres stations qui bénéficient d’une dénivelée plus importante (1000m souvent..) ?

Enfin il faut garder en tête que par exemple en équipant toutes les toitures bien exposées de l’ancien canton d’Aime, il serait possible de produire 13.5GWH. Mais cela ne représenterait que 3% de la consommation (395 GWH) de ce territoire (Cabinet Axenne). Nous ne pourrons donc pas nous dispenser de consommer moins en isolant les logements et en développant les transports en commun..
Il est clair qu’il faudra investir des sommes importantes, mais l’avenir n’est-il pas dans cette direction ?

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