La présence de l’eau sous forme de torrents ou de lacs fait partie du caractère montagnard. C’est pourquoi il nous parait important de conserver des débits non négligeables dans les cours d’eau.. La Tarentaise contribue beaucoup à la production hydroélectrique nationale par de gros aménagements comme Tignes ou Roselend, mais aussi par une multitude de micro-centrales. De nombreux ruisseaux ont déjà vu leur débit trop nettement diminué par la notion de débit réservé qui est un minimum, alors qu’il serait bon de laisser davantage d’eau dans les rivières qui font l’objet de captages en montagne.
Nous avons lu avec intérêt le débat autour du calcul du fameux débit réservé. Le pétitionnaire arrivant à 40l/s alors que les services de la DDT demandent 66l/s. La modélisation s’effectue à partir d’autres cours d’eaux dont on connait bien le débit et dont le bassin versant est bien identifiable. Nous avons été surpris de constater qu’aucune allusion n’est faite à l’équipement du ruisseau des villards il y a quelques années par la société des eaux de Bonneval incluant Serhy. Cette combe est voisine de celle du bassin du Colomban, les précipitations y sont probablement très similaires et le débit du torrent bien connu car exploité depuis plusieurs années. Nous conseillons aux personnes d’aller sur place voir ce qui reste du cours d’eau après captage...Nous serions curieux de savoir si les modélisations concernant le torrent des Villards ont bien été vérifiées par la production effective d’électricité. Serait-il possible de connaitre le débit capté de ce cours d’eau et la production d’électricité effective ? Nous demandons que les aménageurs de torrents soient tenus de publier chaque année la production de leurs micro-centrales.
Les murs en béton de la prise d’eau, à défaut d’être pourvus d’un parement en pierre, vont contribuer à l’artificialisation du site.
D’autre part une seule pêche électrique a été réalisée. Les coordonnées GPS sont indiquées, mais il aurait été bon de les reporter sur une carte. Une deuxième campagne aurait été nécessaire pour confirmer les résultats de la première. L’office français de la biodiversité considère qu’il n’est pas possible de tirer des conclusions à partir de l’étude menée...
L’ONF a constaté la présence en parcelle 20 de nombreux gros et vieux hêtres à cavités pouvant abriter passereaux cavernicoles et pics, rapaces nocturnes, chiroptères.
Dans l’intérêt des paysages et de la biodiversité, et au vu du refus de l’aménageur de prévoir un débit réservé d’au moins 66l/s, notre association s’oppose à ce projet.
Sur le plan de la sécurité, la route RD 213 est sujette à des avalanches. La forêt située au-dessus joue un rôle important pour minimiser ce risque d’avalanche. Or, le tracé de la conduite forcée, dans l’axe de la plus grande pente de cette forêt, va entraîner la création d’un couloir dans lequel des avalanches, des pierres et des morceaux de bois pourraient arriver sur la RD 213.
Dans la présentation non technique du dossier, concernant la contribution de la future microcentrale centrale à l’atteinte des objectifs nationaux de production d’énergie renouvelable, il y est précisé :
La société SERHY Ingénierie, chargée de la construction et de l’exploitation de la future micro-centrale, par sa politique environnementale permettra de produire une énergie propre et renouvelable qui contribuera à l’atteinte des objectifs nationaux de production d’énergie renouvelable.
La Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) sur la période 2019-2028 a fixé un objectif de puissance installée d’origine hydroélectrique à atteindre en 2023 à 25,4 GW. Cet objectif a déjà été atteint fin 2019 1
Nous considérons que cet argument sur la contribution à l’atteinte de l’objectif n’est pas recevable car l’objectif est déjà atteint.
D’autant que toujours dans le cadre de cette PPE, l’augmentation de puissance installée d’hydroélectricité à réaliser pour atteindre l’objectif de 2028 se monte à une fourchette comprise entre 1,1 et 1,4 GW en 2028, pour une augmentation globale d’énergie renouvelable à atteindre en 2028 dans une fourchette de 53,4 à 64,4 GW. La réalisation de l'objectif de développement assigné par la PPE à l’hydroélectricité ne joue que sur 2 % de l'objectif global de développement assigné à toutes les sources renouvelables d'électricité. 2
Concernant la production d’une énergie propre : L’état écologique du Colomban est qualifié de bon à très bon.
Indéniablement, l’installation d’une microcentrale sur un cours d’eau peut avoir des conséquences négatives sur son bon état écologique :
La Directive Cadre sur l’Eau (DCE ), décidée par l'Europe en 2000, exige, entre autre, que nos cours d'eau atteignent le bon état tant pour la qualité de leurs eaux, que pour leur état écologique. Elle interdit également toute dégradation de cet état.
L’état des lieux préalable au SDAGE 2022_2027 fait craindre un écart important par rapport à l’objectif de bon état de nos cours d’eau pour 2027 :
« L’hydro-électricité est avec d’autres activités à l’origine des trois plus importantes pressions qui s’exercent sur l’hydromorphologie et la continuité des eaux, responsables des difficultés à satisfaire les objectifs de de la Directive Cadre sur l’Eau ,décidée par l’Europe en 2020. »3
« Le bassin Rhône Méditerranée est le siège de l’essentiel de la production hydroélectrique française qui a fortement contribué à la dégradation des milieux aquatiques et qui constitue toujours un frein à l'atteinte de leur bonne qualité écologique » 3
« L’Autorité environnementale recommande à l’Etat....de considérer l’atteinte du bon état écologique des eaux comme prioritaire, sur les axes non encore aménagés, dans la nécessaire conciliation des objectifs de la DCE avec ceux de la PPE » 3
Cet état des lieux constate donc que l’énergie hydroélectrique n’est pas propre stricto senso, même si elle est plus propre qu’une énergie d’origine carbonée.
Les prix de l’électricité, ont subi récemment une augmentation considérable. Pour se substituer à l’électricité carbonée, il nous paraît logique de favoriser en France les énergies renouvelables portant le moins atteinte à l’environnement lors de leur installation et exploitation, et aussi les moins coûteuses. L’hydroélectricité est actuellement la plus chère parmi les sources d’électricité renouvelable. D’après la PPE 2020,le MGWh de petite hydraulique nouvelle oscille entre 70 et 160 € face à des coûts inférieurs à 50 € pour les derniers appels d’offres photovoltaïques (perspective 2028, 40 € au sol et 60 € sur toiture) et pour l’éolien (perspective 2028, 55 € pour l’éolien au sol et 44 € pour l’éolien maritime posé à Dunkerque )
1- Mise à jour des indicateurs de la PPE (Indicateurs 2021) Octobre 2022
2- PPE 2020 : Article 3 du décret du 21 avril 2020 pour 2023 et 2028
3- Avis délibéré, 2020–62 de l'Autorité Environnementale sur le projet de schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ( SDAGE) du bassin Rhône-Méditerranée (cycle 2022- 2027)
En conclusion, la poursuite de l'équipement Hydro électrique de nos cours d'eau jusqu'à son terme, n’amènerait qu’une contribution insignifiante à la transition énergétique, mais causerait des dommages irréversibles à la biodiversité.
Vivre en Tarentaise n’en est pas pour autant opposée à toute augmentation de production d’énergie hydroélectrique, loin de là. Il existe un gros potentiel d’optimisation des centrales concédées existantes, comme cela a été réalisé tout près à La Coche , Le Bois . Nous considérons qu’il faut désormais ne plus investir que dans ces rénovations, améliorations des centrales existantes. Les travaux récents à La Coche ont permis d’obtenir un gain de 20 % sur la puissance installée initiale de 384 MW,soit 76,8 MW sans atteinte écologique supplémentaire. Ce gain de puissance équivaut à la puissance installée de 35 nouvelles Microcentrales de 2,2MW du type de celle du Colomban !
Ainsi, pour ce qui concerne le bassin Rhône-Méditerranée, le gain potentiel en puissance installées d’optimisation a été estimé à 1,417 GW.5 Le bassin Adour-Garonne pourrait procurer, un gain de 1,325 GW.
Enfin les observations des éleveurs conduisant leurs troupeaux en Lauzière, montrent que depuis au moins cinq ans la végétation est moins abondante pour cause de sécheresses. Ce phénomène réduit la durée de présence des troupeaux dans le massif. Du fait de l’équipement cumulé de deux vallons contigus on peut craindre un accroissement de ce phénomène et donc un affaiblissement de l’activité d’élevage....
Vivre en Tarentaise a vainement cherché des éléments financiers dans le dossier soumis à l’enquête. Temps de retour sur investissement pour la société Serhi ? Quel impact aurait un débit réservé de 100L/s ou 200L/s sur le « pro- ductible » et le temps de retour ? Ces questions posées par mail au pétitionnaire sont restées sans réponse. Nous le regrettons.
Aussi Vivre en Tarentaise émet un avis défavorable à ce projet de microcentrale hydroélectrique sur le Colomban. Vivre en Tarentaise soutient qu’il faut en priorité optimiser les grosses centrales concédées existantes, suffisantes pour atteindre l’objectif de la PPE 2020-2027.
5- SDAGE du bassin Rhone-Méditerranée 2010-2015 « Evaluation du potentiel hydroélectrique du bassin Rhone-Méditerranée, P 42 »